• PEACE AND LOVE...

    aujourd'hui, j'ai souri, j'ai eu peur, j'ai pleuré... quelqu'un a voulu mourir, quelqu'un que je ne connais pas mais qui ne me laisse pas indifférent. Pourquoi les gens n'ont pas voulu l'aider ? ou n'ont-ils pas vu son mal être ? une fille de 16 ans, anorexique, suicidaire, malheureuse, amoureuse, trahie... ce soir, je réfléchie, je n'arrive pas à tout comprendre, il y a des choses qui me choquent par rapport à cette jeunesse. Elle a mon âge, pourquoi vouloir mourir ? pourquoi ? Ne me faites pas croire que c'est une histoire de sentiments, c'est un mal être beaucoup plus profond. Qui tue à petit feu mais qui tue. Mais s'il vous plait, ne faites pas ça ! je regarde la misère que la mort, le suicide à laisser, c'est une misère qui ne porte pas de nom. Je la hais, et pourtant il faut être fort pour se tuer, mais si lâche aussi. Alors, au fond, ils ne sont pas si forts que ça. Surtout, ne faites pas ces gestes ! soyez fort, ne faites pas comme dans mes romans non plus, ce ne sont que des histoires. Ecrivez l'histoire de votre suicide et suicidez-vous avec mais dans votre tête, dans ces lignes écrites. Vous verrez, avec l'âge, vous y arriverez. Vous avez la force de vos amis et les gens vous aiment j'en suis certaine. C'est souvent quand on est mal qu'on se croit seul mais c'est faux. Bon courage à ceux qui souffrent.


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  • Brian Molko de PLACEBO

    Voilà une personne que j'adore...c'est un homme, un peu femme, il est charmant ; sa musique me plait particulièrement plus que les autres. Je l'écoute lorsque je suis calme, c'est Brian Molko ! Placebo, c'est vraiment un groupe que j'aime, cela fait partie de mes plaisirs de la vie. Lorsque je suis seule et bien, j'aime bien l'écouter. Je vais dans quelques jours, mais cela que "peut-être" aller les voir en concert.


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  •        Deux trois noirs sur une feuillle blanche

            Qui m'aimait ? Personne. Personne ne m'aimait. Pour quelle raison ? Etait-ce mon physique, mon mental, mes envies ? Je ne savais. J'ignorais l'origine de ce rejet social. Ce que je savais, c'était que moi-même me haissais, et que moi-même voulais mourir. C'était du haut de mes quinze ans. Quinze ans de solitude, quinze ans de souffrance ! Pourquoi le destin m'abattait ainsi ? Qu'avais-je fait ? J'étais née. Oui, exactement j'étais née. C'était un crime. Une erreur pour mes parents et pour tous les gens proches de moi. Ils ne lâchaient pas leur égoïsme. Rien ne les importait, à part eux. Leur vie. Je méprisai dès mon plus jeune âge. Je dédaignais leurs opinions et n'en faisais qu'à ma tête. L'envie me prenait.

    Je sus ce qu'était la solitude dès ma naissance lorsque le cordon ombilical fut coupé. Mélancolique fut alors mon existence. Pleurer ne servait à rien. Se plaindre de même. Et le mot pourquoi qui revenait chaque fois que j'expirais. Je ne désirais plus vivre et pourtant, j'étais sur cette Terre. Une terre, un monde brute remplie de gens tristes, souvent égoïstes aussi. Que des questions me hantaient l'esprit. Le jour, la nuit. Tous le temps. Je vivais attendant avec impatience, un miracle qui pimenterait ma vie. Mais jamais rien ne se passait. Ma patience avait des limites. A quinze ans, vivre m'était devenu insupportable. Dieu sait si j'en souffrais. Mais existe-t-il ? Seul lui le sait aussi.

    Je n'avais rien à faire dans ma demeure. Mes parents ne souhaitaient pas d'enfants. Pourquoi étais-je là ? Pour rien. Je ne servais à rien. Faire le café ? laver la vaisselle ? J'étais en fait, une fille, c'est tout. Une fille arrivait lors d'un accident ; à cause de deux personnes irresponsables. Je leur en voulais. Ils ne m'aimaient pas. La réciprocité de nos sentiments m'aidait à bien vivre la situation. Ils me nourrissaient seulement et rien d'autres. En grandissant, les questions se multiplièrent, les soucis aussi. Les idées suicidaires s'aggravèrent, les gestes de même. Victime de solitude, délaisser par mes proches, je passais mes journées à sangloter. Pour oublier mes soucis, j'allais au lit.

    Vers trois ans, je dessinais des moutons. Oui, les moutons m'attiraient. Comme beaucoup d'animaux. Ma mère me prenait pour une simple d'esprit mais je ne l'étais pas. Peut-être que je le devenais par sa faute ? Mon père était absent la plupart du temps. Il vivait pour les nombreuses femmes qu'il aimait. La fidélité de faisait certainement pas partie de son vocabulaire. Ni celui de ma mère. Pourquoi restaient-ils ensemble ? Etait-ce pour moi ? Je ne le sus jamais.

    Ma chambre était une étroite pièce obscure dans laquelle se trouver des milliers de choses. A l'origine, c'était une salle de bain. J'avais le droit de coller mes dessins sur les murs. Lorsque je m'ennuyais, alors la peinture m'aidait à surmonter cette étape difficile, en favorisant mes envies, mes désirs, mes bonheurs...J'oubliais ainsi quelques soucis. Parfois, c'était magique. Mes œuvres, si l'on peut dire, étaient si obscures qu'à travers elle, on devinait mon malheur. Malheur de vivre ainsi, ici. A l'école, je restais assise seule dans un coin sombre. Inintéressants étaient tous ces jouets que les autres adoptent avec tant d'assurance. Je refusais tout. Comme si, déjà si jeune, je repoussais l'idée de vivre. Je perdis aussitôt mon seul ami, un chat et je compris très rapidement que la mort arrêtait la vie. Et que le noir signifiait la peur, la mort, le deuil. Le rouge, le sang. A cinq ans, ma vie n'évoluait pas. J'apprenais seule ce que je connaissais. Mes grands-parents me gardaient de temps à autre. M'aimaient-ils ? Non. Moi, je n'avais pas de cœur et eux, n'en avait pas un assez grand pour m'y faire rentrer à l'intérieur et me chérir de tous leur amour. Le partage, ils ne connaissaient pas. De toute manière, ils ne connaissaient rien.

    La haine régnait dans notre demeure. Chaque jour, chaque nuit. Elle envahissait notre cerveau, nous bourrait le crâne sans qu'on puisse s'en rendre compte. En vieillissant, j'appris à m'y habituer. Même dans mes rêves, la haine était là. L'amour était absent. Ce sentiment, je ne le rencontrai que très tard. Juste avant ma mort. Une mort malheureusement bien précoce. Pendant dix ans, je menai une vie reposant malgré les nombreux rebondissements dû aux disputes de mes parents. Enfermée dans ma chambre, je lisais, écrivais, chantais parfois espérant toujours cette lueur positive qui éclairerait le peu de mon existence morose. Je ne parlais ou très peu. J'écoutais les gens parlaient pour comprendre. Ce que j'entendais était confus. Mais je compris très vite que le monde n'était pas comme on pouvait l'imaginer.

    Souriais-je ? Jamais. Je n'en avais pas la moindre occasion. En rentrant au primaire, on m'inculqua de façon simple et directe la lecture ; à six ans. On m'acheta des livres que moi seule lisais, couchée sur mon lit. Ma famille se moquait bien de moi. J'avais naquis hors mariage, voire hors l'amour. et pourtant, j'étais ici, avec ceux qui m'avait donné la vie pour leur plus grand désespoir. Abominable, était-ce. A en vomir quand j'y songeai. Et Dieu sait si j'y pensais. Je tentais de comprendre. En conclusion, j'optai pour le suicide ; mais bien plus tard. Ce fut cependant trop tôt.

    Durant mon enfance, je regardais les yeux. Le bonheur se voit dans les yeux. Cette phrase, je la prononçais plus d'une fois par jour. Les yeux se mirent à me passionner, comme l'art. Des yeux pétillants appartenaient à des enfants radieux tandis que les autres étaient malheureux. Comme moi. Comme je l'étais sans cesse, d'ailleurs. Fermer les yeux pour dormir ? ou pour mourir ? Qu'importe. Mes yeux, malgré leur couleur bleu ciel restaient ouverts jusqu'à ce que la fatigue soit à son comble. En revanche, mon sommeil était d'une qualité rare, à cette époque. Je n'arrivais toujours pas à me trouver d'amis. En voulais-je un ? Certainement pas. Je tapais. Vraisemblablement, le sadisme était en récréation ma principale occupation. Ce ne fut que passager.

                Je grandis alors dans une sobre vie. Des livres, des images, des dessins, voilà ce qui traduisait ma joie de vivre. Des cris, de la violence et une certaine trahison, voilà ce qui me tua. D'une intelligence remarquable, les adultes m'admiraient. Mais j'étais celle de deux personnes inconscientes de la chance qu'ils avaient. Sans prétention aucune. Leur absence, leur manque d'amour ne faisaient qu'envenimer les évènements. Lorsque je pris conscience que je les haïssais, une chose me hanta l'esprit : les tuer. Les faire souffrir au même degré que je souffrais. Mais je n'osai jamais faire un geste pareil. J'arrivai sur mes onze ans avec l'idée de devenir écrivain, voire peintre. Le monde empestait de gens sales, infâmes, orgueilleux. Ils me faisaient devenir égocentrique, à un point que moi aussi me mit à penser seulement à moi, et jamais aux autres. Pour moi, il n'y avait aucune personne capable d'aimer, je généralisais les gens, je n'avais aucune idée de la vie, et pourtant, je n'y croyais déjà plus. Apprécier les gens à leur juste valeur, c'était pourtant la moindre des choses. Moi, on me jugeait avant que je puisse parler. Du coup, la terre sur laquelle je vivais, était répugnante, remplie de parasites géants qui croupissaient la vie de personnes me ressemblant – si ça existe. Avec mes dessins et mes écritures, je tentai de transformer le monde dès l'âge de dix ans. C'est ainsi que mes œuvres devinrent plus claires, plus blanches, contrairement au monde que je concevais. Je faisais sécher des fleurs pour les coller sur les murs de ma chambre. J'y mettais des photos de ma petite enfance. Horrible était le côté droit de ma porte. Je l'avais peint tout de noir. Le côté gauche, tout de rouge. Mes parents n'y prêtaient aucune attention, à mon grand désespoir. Chaque jour, ils me prouvaient que je ne me trompais point étant donné qu'il n'y avait aucun échange. Pas un mot. Pas un regard. Rien. Juste trois corps différents tâchant de respirer dans la même pièce. Notre antagonisme des raisons multiplièrent les conflits lorsqu'on parlait. Ils s'agissaient cependant, de moments très rares. Et lorsqu'ils étaient là, je les craignais. Pourtant, j'osais faire découvrir le fond de mes pensées. J'étais même parfois fière. Cela, que très tard. Le temps métamorphosait le monde ; il me métamorphosait à moi aussi. Mes pensées changeaient, mes goûts de même. Mes dessins se remplissaient de couleur. Couleurs sombres. Parfois claires lors du printemps. Le soleil arrivait, quelques temps, à illuminait ma vie. Je me couchais sur l'herbe sèche fixant les nuages au-dessus de moi. Ils bougeaient. Ils bougeaient aussi vite que ma tête tournait. Les arbres agitaient leurs feuilles comme pour me dire adieu. Mais je vivais toujours. Pourquoi ? Parce que l'espoir était là.

    A l'école, même sans amie, j'étais réjouie. Je pouvais voir du monde, je pouvais l'entendre, je pouvais apprendre. Telles choses me satisfaisaient pleinement ou presque. La nuit, je restais devant ma fenêtre ouverte pendant quelques minutes tentant de respirer l'air frais de la campagne. Ecoute le silence était une passion. C'était cela qui m'apaisait. Plus rien n'existait dans ces moments-là. Seulement la nature et moi. C'était déjà beaucoup.

    Jusqu'à mes dix ans, je m'habillais sobrement. Puis, je pris conscience qu'on aimait ce qu'on aimait. Qu'on haïssait ce qu'on haïssait. Puis tout le reste. Mes parents m'achetèrent un vélo. Acte que j'appréciai, je leur en remercie. Premiers moyens de transport, premières promenades. Premières fugues. J'avançais d'un pas rapide pour atteindre la ville. Tous les matins, j'allais au primaire accompagnée de ma bicyclette. Je passais mes fins de semaines à gambader dans les près, à courir après les poules et à ramasser des fleurs. Les soirées d'été étaient les plus magnifiques. Je faisais sécher dans de vieux journaux les pâquerettes et les marguerites. Mes fleurs préférées. A six ans, grâce à ma grand-mère, je plantai un chêne non loin de ma chambre. J'y prenais grand soin ; il était mon confidentiel. Je me disais aussi servir à quelque chose. Malgré cette idée de mort qui me tracassait.

                Je rentrai au collège vers onze ans. Je regardais le sol. Les yeux qui auparavant m'intéressaient, me faisaient peur. Que pensaient-ils de moi ? De mes habits ? C'est ainsi que durant des mois, le regard des autres faisaient fuir le mien. C'était très difficile à assumer. Mais je réussis. Ensuite, je m'en moquais éperdument. J'allais même jusqu'à être provocante. J'étais parfois vêtue tout de noir. Comme si j'étais en deuil. On m'en faisait régulièrement la remarque. Puis le reproche. Si on venait à me taper, je me débattais et donnais des coups de pieds à tous bout de champs, jusqu'au moment où l'un d'entres nous se mettent à geindre. Oui, nous étions des enfants. Je restais neutre, sans larmes, ou très peu. J'avais ma fierté.

    Une haine de la vie m'envahit lorsque j'eus treize ans. Je lisais à longueur de journée. Véritable autre passion. La plus belle qu'il soit. Je devins très proche de ma grand-mère qui me donnait de l'argent de poche pour que je puisse m'acheter de l'argent et des décorations. Ma chambre contenait plusieurs objets, des vingtaines de babioles mais très peu de jouets. J'avais des étagères où de nombreux romans les tapissaient. Je collais des posters de certains idoles, mes dessins clairs décoraient le plafond, les plus sombres, le sol. Une authentique pièce d'artiste. En être une était mon désir le plus fou. Je le devenais pourtant sans y faire attention. Etant donné que mes parents rentraient très tard le soir, c'était moi qui en revenant de l'école, préparait le dîner. Parfois, je ne mangeais pas. Je n'avais pas faim. Le pire, c'est que je devenais fébrile, maigre, horrible. Lorsque je me regardais dans la glace, c'était le dégoût de mon être qui me faisait vomir. Je voulais me tuer chaque instant passé, à me regarder dans un miroir. Ce n'était pas moi. Juste une fille. Qui devenait une femme. Et qui pourtant ne voulait pas l'être. Je n'en fus jamais une entière.

    Plus le temps passa et plus le maigre espoir se transforma en désespoir total. Effectivement, plus rien n'agitait ma vie. Le néant, chaque instant. Des moqueries à longueur de journées. Aucune rencontre. Pas d'amitiés ; encore moins d'amour. J'en voulais. J'en avais besoin vers treize ans. Mais jamais rien ne se passait. Mon cœur, l'organe me permettait de vivre. L'autre n'était rien. Il n'existait pas. Enfin, c'est ce que je croyais. Mes bras me servaient à porter des plats, à me laver, mes mains me permettaient de dessiner. Mes jambes m'aidaient pour marcher. Mais je vivais pour quoi ? Je ne faisais rien. N'aimais personne. Pas même un animal. Mon chêne éventuellement. Avait-il une âme ? J'espérais. J'espérais beaucoup de choses. Beaucoup trop.

    C'est alors que je me mis à fuguer. Fuguer, fumer et boire. Ce que faisait une adolescente. J'en étais presque une. Un matin, je volai l'argent de mon père pour m'acheter des cigarettes. En rentrant dans le bureau de tabac, je fus prise d'une bouffée de chaleur atroce malgré le mauvais temps, et en bafouillant, je demandai tant bien que mal un gros paquet. Je partis m'asseoir dans l'herbe mouillé et grâce à quelques allumettes, j'allumai ma première cigarette. Je devais avoir presque treize ans. Je la pris entre deux doigts comme le faisaient mes parents et certains de mes camarades. Elle sentait mauvais. La fumée me fit tousser à plusieurs reprises et lorsque je tirai une bouffée, je m'étouffai considérablement. Ensuite, je ne fumais pas. Peu à peu, j'appris à le faire. J'appris à apprécier mes cigarettes.

    C'est environ vers cet âge-là que l'envie de m'enfuir au loin me vint à l'esprit, soudainement. J'empruntai un soir d'automne, un grand sac à mes parents – de nouveau absents – et je mis quelques affaires susceptibles de me servir lors de cette éventuelle fugue. Ce n'était pas la première fois. Les précédentes n'avaient durer que quelques heures. Mes parents ne s'en étaient même pas rendus compte. Je volai de l'argent à mes parents puis je pris la fuite le soir après dîner. Il ne faisait pas beau. Quelques gouttes se mirent à tomber sur la ville faiblement éclairée. Mon sac était encombrant et de plus, j'étais à pied. Le vélo n'aurait fait que m'encombrer. Je m'assis un instant sur le trottoir pour me reposer. Que faisais-je ? Une bêtise. Une crise. Je franchissais une interdiction. Montrer ainsi à mes parents que la vie n'était que désespoir à mon égard.

    Je sortis mon paquet de cigarettes bientôt vide et fumai les trois dernières qu'il me restait. Une forte angoisse pris place au fond de mon cœur. Une pierre tentait désespérément de transpercer mon corps qui souffrait parfois d'atroces douleurs. J'ignorais pour quelle raison je ressentais cela. Je repris pourtant mes affaires pour me cacher sous un pont. Il pleuvait. Il pleuvait de plus en plus sur ma ville. Les gouttes ressemblaient à des larmes. Mes larmes à moi. Elles coulaient abondamment. Tous les soirs. Et quelques matins. Des journées dures qui s'écoulaient et qui me rapprochaient de cette mort, que j'attendais avec une étonnante impatience.

    Je sortis de mon sac un oreiller et un drap. Je m'allongeai au-dessous du pont. J'entendais les gouttes de plus s'abattre sur le sol. Des pas résonnaient au loin, des enfants pleuraient dans les maisons, des voitures passaient sur le pont, leurs essuies glaces grinçants. Je fermai les yeux une première fois. Dormir sortait de mes capacités. Ces bruits, ces douleurs et ces angoisses se mirent à me troubler, autant l'eau se troublait par l'averse. Je mordais mes lèvres pour éviter de pleurer. Mais je le faisais déjà. L'horreur de cette vie devenait insupportable. Pourquoi étais-je là ? couchée telle une vagabonde ? De quoi allais-je vivre ? Il faisait froid. Bientôt, plus personne ne bougeait dans le village. Seuls les clochards et les chats faisaient le tour des poubelles. Pourtant, les bruits se faisaient par milliers. Je ne pouvais dormir par ces résonances monstrueuses. J'avais la crainte de me faire agresser, violer, tuer. Mais n'était-ce pas mieux que de dormir chez soi ? Non. Non, ce n'était certainement pas mieux. Pas confortable, bruyant, insécurisant. L'idiotie d'une fillette d'à peine quatorze ans, inconsciente du danger. C'est vers quatre heures du matin que je pus enfin m'endormir pour me réveiller deux heures plus tard.

    Pourtant tôt, les gens bougeaient, se levaient pour aller travailler. Il ne pleuvait plus mais la nuit était encore noire. Comme les ténèbres, parfois. Mon ventre réclamait dès lors, de la nourriture. Je n'avais pas eu l'idée d'en apporter un peu. Un cri amusé d'un jeune homme me fit lever. Levant la tête tentant d'apercevoir qui était-ce au dessus du pont, je perdis l'équilibre dans mes grosses chaussures et ne manqua pas de tomber dans une flaque boueuse. Un rire moqueur se dressa au-dessus de moi. Honteuse, je revins m'asseoir dans mon petit nid, toute recroquevillé tel un enfant étranger qu'on amène en France. L'homme n'était pas tout à fait un homme, mais plutôt un adolescent de deux ou trois ans de plus que moi. Jamais je ne l'avais vu ici. Contrairement aux précédentes minutes, je crus vomir mes intestins. Ecœurant était l'endroit où je me tenais : des poubelles entassaient les unes sur les autres, deux alcooliques tentaient de s'embrasser sous les encombres d'une usine de ferraille, une odeur nauséabonde. Le relent de pourriture me fit hoqueter à plusieurs reprises. Comment pouvais-je supporter cet endroit ? Je pris mes affaires et courus, courus jusqu'à ce que mes poumons se plaignent. Le jeune homme tout de vert vêtu, était encore là. Il me regardait. Gênée par ce dernier, je risquai tant bien que mal de m'introduire dans une épicerie pour acheter un pain au chocolat. Très aimable, l'épicière me servit avec un très large sourire, aussi très étrange ; comme si elle avait pitié de moi. Oui, effectivement, mes tâches de boue sur mes vêtements, mes cheveux décoiffés et mon sac lourd à la main, laissait penser que je vagabondais depuis un certain temps. Comme si d'une seule journée, j'avais pu devenir une mendiante traînant dans les rues pour trouver le bonheur d'avaler quelques miettes. Je ressortis du magasin la bouche remplie. Le jeune homme était encore là mais l'air, cette fois-ci, plus inquiet. Il lui suffisait à présent de traverser la route pour me rejoindre. La panique débuta pour moi. Voulait-il profiter de moi ? C'était un homme après tout. Des spasmes gênèrent ma respiration. L'Homme vert comme on pourrait l'appeler s'approchait de moi, un sourire aux lèvres comme pour se donner une personnalité familière. Je fis semblant d'être pressée pour lui échapper. Il me rejoignit très vite en m'attrapant l'épaule pour me demander du feu. Je poussai un hurlement, puis me retournai d'un geste brusque lui repoussant sa main velue.

       _Je ne voulais pas te faire peur.

       _Je n'ai pas eu peur, mentis-je, sans succès.

    Je lui passai une allumette pour qu'il puisse s'allumer sa cigarette, puis il me demanda curieux où j'allais ainsi. Je ne lui répondis pas car j'estimai que ma vie ne le regardait en rien. Finalement, jamais je n'avais parlé à quelqu'un, il serait donc une exception, car après insistance, je lui répondis :

       _Je vais nulle part.

       _Suis ton destin, me dit-il.

    Il me salua et repartit attendre son car de l'autre côté de la rue. Je n'avais pas de destin. La mort était ma principale route à suivre. Si le destin ressemblait à ça, alors je ne comprenais pas tout sur cette Terre. Y avait-il des choses à comprendre ? De moi, rien.

                En allant sur d'autres routes, je m'assis dans l'herbe pour étudier certains insectes et pour dessiner. Je ne pouvais pas m'en empêcher. Je voulais tout écrire, tout dessiner. La vie étant nulle, je voulais trouver ce qui était bien en dessinant. Dans ces moments-là, les idées morbides disparaissaient laissant place à une béatitude passagère. Lorsque je voulais pleurer, je le faisais. Aucune honte, aucun sentiment de soumission par rapport aux autres filles. Personne ne me voyait. Personne ne m'entendait. Etais-je seule à vivre sur cette Terre ? Etaient-ils des hallucinations venant de ma part ? des gens virtuels ? Où étais-je invisible ? Cette dernière hypothèse était la plus réelle. Une seule personne me voyait, c'était l'Homme vert. Il m'avait parlé comme aucun être humain n'avait osé le faire jusqu'à présent « suis ton destin » Idiot ! Je n'avais pas de destin, sinon, celui de m'abattre. Tout à coup, le soir même, je ne sais ce qu'il me prit, je criai au beau milieu d'un rond-point que ce monde n'était que stupidité et irréalisme ! Les gens me regardaient. Enfin, pour la première fois, on leva le regard sur moi, comme lorsque j'urinai sur moi à l'école maternelle. Dans le même but de me faire remarquer. Pas par mes bêtises, mais par mes œuvres et mon comportement excentrique. La haine de cette vie n'était pas à cause de moi, mais à cause de ces gens qui m'entouraient. Ceux-là étaient incapables, stupides, immatures. Ils ne connaissaient rien à cette vie. Moi qui pourtant à quatorze ans, n'en savais pas la moitié, était capable de laisser un cadavre conscient de l'erreur qui la commise. Mais bien que conscient, ce cadavre serait la preuve réelle que les gens qui sont mal aimés, sont des gens qui ne s'aiment pas non plus. Et je me détestais autant que je pouvais aimer la mort. Oui, morbide je l'étais. Depuis ma plus tendre enfance. Car lorsqu'on prend conscience que nous avons ce pouvoir de nous tuer, il n'y a pas plus de satisfaction au cours de notre vie.

    J'avais apporté un couteau ce jour-là. Me cachant au même endroit que la nuit dernière, je le pris et me coupais tous le long du bras. C'était horrible, le sang coulait sur mes habits mais je me moquais bien de cela. L'énervement, cette haine, ces dégoûts, tout me pousser à l'extrême ; pour évacuer cette souffrance, je me faisais mal. Mais je ne voulais pas encore mourir. Pas sans avoir revu l'Homme vert. Je remis mes draps sur le sol et m'endormis cette fois-ci rapidement. Ne rien faire m'avait épuisé. C'était cela qui rendait la fatigue atroce. L'ennui épuisait. Mes douleurs m'empêchaient de bouger. Les pompiers passèrent deux fois cette nuit-là. Comme ça, je savais que je n'étais pas la seule à souffrir.

    Le lendemain matin, je fus réveillée par une secousse. C'était l'Homme vert de nouveau. Je fis un bond mais celui-ci me mit un doigt sur la bouche pour éviter que je réveille les autres personnes qui dormaient près de moi. Ses yeux étaient d'une beauté magique. Bleus. Ces dernières s'ouvrirent de surprise en apercevant l'état de mon bras. Le sang avait taché ce que je possédais. Les larmes se mirent à monter mais Nicolas me prit directement dans ses bras pour que je puisse me calmer. Qui était-il ? Mon ange gardien ? Je dédaignais toutes caresses alors je le repoussais méchamment. Il était extrêmement vexé. Il prit son sac et partit en se disant très déçue par le comportement des filles. Je courus après lui en lui disant que ce n'était pas de ma faute et que je m'en excusais sincèrement. Peut-être touché pour les mots que j'employais, il revint vers moi pour me proposer son assistance. Je ne savais que faire. On s'assit alors tous les deux sur mes affaires. Il ne voulait pas aller en cours. Jamais une personne me procurait un tel effet avec son regard.

    J'en avais la chair de poule. Que se passait-il dans ma tête ? Je n'étais plus la même. Il prit soin de moi pendant quelques minutes. Il tenta de me panser les blessures. Il souffrait, je voyait qu'il souffrait de me voir souffrir. Lui, lui seul avait un cœur. Je l'admirais pour son courage et les qualités qu'il possédait. Nous nous étions rencontrés de façon si étonnante que je me mis à penser qu'il serait l'homme de ma vie. Enfin, je l'avais trouvé !

    Soudain, un groupe de gendarmes se précipita vers nous, poussèrent Nicolas et m'attrapèrent. Que voulaient-ils ? Ils me regardaient comme si j'étais une aliénée. Qui sait ? Peut-être en étais-je une ? Au loin, je vis mes parents arrivaient comme si l'absence de leur fille les avait inquiétées. Ma mère me mit une gifle, mon père me mit la deuxième, une plus puissante que l'autre. Je jetai un coup d'œil à Nicolas qui semblait traumatisé par ce genre de caresses. Il voulait me protéger étrangement. Un lien se mit à naître dès ce jour. Un lien affectif que je voulais entretenir avec lui mais que les parents refuseraient catégoriquement. Me voir avec un garçon leur avait fait un choc, dû à mon comportement sauvage qui me conduirait vers le célibatariat. On m'amena à l'hôpital me radotant de paroles que je n'écoutais même pas. Je pensais trop à Nicolas. Pourquoi voulait-il m'aider ? Et pourquoi voulais-je le revoir ? Il était beau en effet. D'habitude, je ne m'attachai pas aux personnes mais lui, il était différent. Très différent. Pour ma part, les sentiments aussi devenaient différents.

    A cause de cette petite fugue qui ne dura qu'un jour et demi, je m'enrhumai. Je dus rester au lit le restant de la semaine en prenait des médicamments. De l'homéopathie aussi. Ma vision des choses se métamorphosa de nouveau. On me punit. De tout. De rien. Je n'avais plus le droit de sortir, seulement la possibilité de faire la vaisselle. J'avais toujours cet espoir de revoir Nicolas. C'était ma raison de vivre. La seule. Je ne vivais que pour lui, quitte à le revoir juste une minute, mais au moins une fois. Mais, par chance, on m'en donna plus. Des mois, des longs mois de tendresse. En effet, je le revis un mois plus tard après l'événement. Il semblait vraiment heureux de me revoir. J'avais repris des couleurs. Je m'étais levée très tôt pour le revoir attendant son but. Il était devenu rouge devant ses amis. Parfum, beaux vêtements, je mettais fait « belle » pour lui. Certains penseraient que j'étais amoureuse, or j'ignorais ce que c'était. Nicolas venait d'acheter une moto ce qui lui permettait de venir chez moi le week-end lorsque mes parents partaient. Un fort sentiment prit place au sein de notre couple. L'amitié que nous ressentions, il me sembla qu'elle se transforma en amour. C'est quelques semaines après avoir pris connaissance qu'il me prit la main et m'embrassa tendrement. L'étreinte fut pourtant courte mais inoubliable. On alla se promener main dans la main ce jour-là. Je n'étais plus moi mais il me restait cette partie de tristesse que je n'arrivais pas à enlever de mon corps. Cependant, je ne souhaitais plus mourir. Je voulais vivre pour ressentir les mêmes émotions que lors de nos baisers. C'était toujours avec amertume que je le quittais. Trois mois passèrent ainsi ; il me rejoignait un week-end sur deux. Interdit de téléphone, nos relations étaient limitées à cela. Mais je tenais le coup. Je ne le tins pas longtemps.

                Un jour, il ne revint pas. Je reçus un courrier selon lequel, il était désolé mais son cœur l'attendait près de chez lui. Il allait se fiancer avec une autre fille me laissant mourir de mon côté. Aucun soutien, il ne m'apporta. Rien. Pas même une visite accompagné de se charmante petite amie. Savait-elle mieux embrasser que moi ? Je ne le sus jamais. Tout s'éteignit bien avant que je continue mes recherches. Parents absents, plus d'amour, pas d'amitié. Une seule solution : la mort. Nicolas sortait avec la même fille depuis ses seize ans, il en avait dix-huit. Il l'avait trompé, il m'avait trompé, il se trompait lui aussi. Comment pouvait faire cela ? Comment mentir à une personne lorsqu'on affirme l'aimer ? Pourquoi je me posais tant de questions ? Pourquoi hurlai-je ? Pourquoi me faisait-on tout ce mal ? Ces questions me hantaient l'esprit. J'allais sur mes quinze ans, le cinquième d'une vie. Je ne connaissais rien et pensais tout savoir. Toutes les épreuves que j'avais endurées pendant ces années. Tous ces moments de malheur, de mélancolie, de désespoir mais aussi d'espoir. Des sentiments naissants, disparaissants sans cesse de cette vie maussade. Mes dessins que j'avais dessiné tout le long de mon enfance, mes écritures noires qui décoraient mes meubles, mes feuilles rouges qui tapissaient les murs. La peinture que j'avais renversée lors de mes premières petites œuvres, mon premier livre, ma première gifle, mon premier et dernier amour, mon premier baiser, mes premiers jours d'école, toutes ces choses refaisaient surface dans ma mémoire qui ne cessait de fonctionner à longueur de journée. J'étais totalement dans un état dépressif dû à cette déception sentimentale ; mais aussi depuis ma naissance. J'étais malade. Pourtant, je pensais avoir des enfants plus tard. Mais ce n'était pas cela. Trois mois de mensonge. Une trahison.

    Comment avais-je pu me laisser avoir ? j'étais devenue faible. Toute personne aurait pu m'avoir. Mais lui seul en avait eu l'idée. Il avait l'air si sincère. Si la vie n'est faite que de mensonges et remplie de trahison, d'enfants tristes et d'adultes irresponsables de leurs actes, alors que je n'avais rien à faire ici. Je ne l'écrivis même pas sur une feuille avant de mourir. Je laissais un simple cadavre. Avec une chambre allant du plus clair au plus sombre. Qu'allaient faire les gens en apprenant ma mort ? Rien. Verser des larmes ne prouvaient rien. Nicolas lui fit bien comprendre. Ils m'enterreraient le plus vite possible. Ils jetteraient des fleurs fanées. Ils rigoleraient en sortant du cimetière. Encore pis, s'ils ne m'incinèrent. Le feu, c'est terrible. Pis encore que la mort elle-même. Brûler, brûler un corps qui a fait du mal, je considérais cela comme une bonne chose. Mais pas les gens malheureux. Non, pas moi. Je refusais.

    Espoir inespérée pour continuer à vivre. Impossible de l'oublier, cette histoire. La première personne qui comptait pour moi était comme toutes les autres. Je n'aimais plus l'espèce humaine, plus l'amour. L'amitié était le sentiment de le plus inconnu. Et Dieu sait si c'est le plus important. Une amie est un soutien constant. Avec elle, je ne serais pas morte. Mais, au collège, puis désormais au lycée, personne ne voulait me parler. Je fronçais les sourcils sans jamais ouvrir la bouche pour sortir un son. C'était digne d'un enfant de cinq ans. Au fond, je n'avais pas grandi. Ni physiquement d'ailleurs. Je restais l'enfant que j'avais été et refusais d'être un adulte. Surtout après avoir souffert comme les grandes personnes peuvent souffrir. Ils m'apprenaient rien de bien à leurs enfants. Mes parents étaient infidèles, je voulais être le contraire ; bref, c'est moi qui avais été trompé. Quel souffrance lorsqu'on apprend cela. Une flèche qui traverse le cœur fait autant subir. J'avais envie de le dire à quelqu'un. Mais qui me comprendrait ? Parfois, j'espérais. Peu, mais j'espérais discuter avec quelqu'un d'autre qu'à mes histoires. Mais l'exprimable n'était que dans ces feuilles qui se multipliaient sans cesse et toujours s'entassant sur mon bureau, mal lavé, poussiéreux et encombrant dans ma chambre étroite. Cette pièce qui, si elle avait une âme, avait tout vu, tout entendu. Des crises, de l'amour, elle avait aussi subi mes crises de nerfs ; tout cela lui avait montré quels sentiments, ces nombreux sentiments qui n'avaient que forgé mon caractère et amplifiaient mes actes d'autodestructions étaient si durs à vivre parfois.

                Le dimanche soir, lorsque la pluie tombait, j'ouvrais la fenêtre de ma chambre. Toutes mes affaires se trempaient. C'était le début de la fin. Je pleurais autant de larmes que les nuages, la pluie. Elles se tuaient sur le sol sans plus espérer. Comme moi. Je laissais traîner des feuilles blanches. Et des plumes noirs. Automutilation multipliait par deux. Désespoir. Envie de rien. Le néant. Je regardais avec une vue troublée, ce qui m'entourait. Je touchais, sentais de mes mains mes anciennes œuvres, la pluie, le bois, le sol, mon corps qui semblait vidé. Dégoût, du vrai dégoût. Plus rien ne m'intéressait. Je voulais bien, oui quitter cela. Le monde. Ce monde qui n'avait prouvé ses misères. Combien de personnes veulent mourir ? La plupart sont si faibles qu'ils ne peuvent pas. Mais moi, j'avais des mains, des bras, un corps cicatrisait de la tête au pied, ce corps que personne n'enviait, que personne n'osait touché. Pas même moi. A part des lames d'un couteau. A quoi bon restait ?

    Une feuille blanche traînait sur mon bureau un soir d'été. La fenêtre ouverte, la pluie tombait mouillant le sol, dégradant mes œuvres. Mes œuvres de la vie. L'orage grondait fort. Je m'emparai d'une plume rapidement, je fis de ma plus belle écriture un premier trait noir sur la longueur de la feuille. Je ne pleurais plus. Je fis un second trait en fermant les yeux, sur la largeur. On pouvait apercevoir une croix.

    Etait-ce le moment de mourir ? Oui, je le voulais. J'avais attendu quinze ans ; quinze ans et dix jours. Beaucoup trop. Abus. L'abus fait toujours du mal.

    Et le mal, je savais ce que cela représentait.

     

    Je pris un couteau

    Celui de mon père

    Je le tins toujours sans pleurer, très fort

    Puis enfin, je fis ce que j'avais à faire,

    Je m'ouvris les veines

    Je rejoignis mes aïeux

    Je partis dans le ciel

    Ou peut-être ailleurs,

    Plus de sentiments

    Plus rien

    Le néant

     

    LA MORT

     

    Je ne laissai que mon corps, du sang et cette feuille tachée par du rouge.


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